Dans les coulisses du pouvoir, l’amitié n’a plus sa place seul le résultat compte. Glaçant…
L’argument : Stephen Bellamy, attaché de presse, conseiller de campagne du gouverneur Morris, est jeune, séduisant, brillant, ambitieux et déjà très expérimenté. Il prépare les primaires de la présidence américaine sous la tutelle de Paul Zara, directeur de campagne incontournable qu’il admire et dont il a toute la confiance. Tous deux, profondément convaincus de leurs idéaux politiques et sociaux, s’engagent honnêtement, avec une solidarité indéfectible, dans ce combat électoral. Mais il faut gagner… Dans le jeu des cartes du pouvoir, la trahison est-elle inéluctable?
La critique :
Adaptée de la pièce américaine, Farragut North, basée sur l’histoire vraie de Howard Dean et écrite par le dramaturge Beau Willimon – créateur de la série House of Cards–, Les Cartes du pouvoir nous plonge dans les coulisses de la politique où l’amitié n’existe plus et les coups bas sont légion.
Ce sont les primaires en Iowa dans le camp démocrate. Dans un hôtel qui sert de QG à la campagne du gouverneur Morris, un idéaliste qui rêve d’une société juste, son directeur de campagne, Paul Zara, interprété férocement par Thierry Frémont, discourt des talents de son jeune et brillant attaché de presse, l’arrogant et séduisant Stephen Bellamy, incarné magnifiquement et magistralement par Raphaël Personnaz. Âgé d’à peine 25 ans, le jeune homme est un véritable stratège sachant manier vérités et mensonges pour le seul bien de son candidat. C’est un virtuose de la politique qui a les dents longues, mais dans ce combat sans merci pour accéder à la Maison Blanche, les pièges, les chausses trappes, les faux amis et les secrets vont contrarier considérablement ses rêves et ses désirs de gloire ainsi que mettre ses nerfs à très rude épreuve.
Autour de ces deux loups de la politique gravitent les autres membres de la meute, tout aussi dangereux mais de moindre envergure : une journaliste du New York Times dont les posts sur son blog sont encore plus assassins que ses articles, Ida Horowicz, jouée impeccablement par Elodie Navarre ; un jeune ambitieux, Ben, qui rêve de prendre la place de son mentor Stephen, incarné avec talent par Julien Personnaz, le frère cadet de Raphaël ; une jeune stagiaire à la sexualité exacerbée, difficilement interprétée par Roxane Duran qui n’est vraiment pas au mieux de sa forme ; le directeur de campagne du camp opposé, trouble et machiavélique, prêt à tout et surtout au pire pour l’emporter, incarné par le fabuleux Francis Lombrail ; un autre journaliste moins ambigu, Franck (Jeoffrey Bourdenet) et pour incarner le peuple américain un jeune serveur de restaurant qui se bat pour survivre et croît aux promesses de campagne du gouverneur Morris, (Adel Djemaï).
Durant 1h50, les ambitions et les opportunismes de chacun s’affrontent sans pitié. Ce tourbillon sans fin et sans morale les entraînera tous vers une descente aux enfers de plus en plus incontrôlable. Dans cette comédie de mœurs, où le rire n’est jamais loin des larmes amères, la crudité des dialogues et des situations s’enchaînent à un rythme infernal. Véritable combat de boxe qui ne cessera qu’aux premières effusions de sang, les coups sont rendus sans retenue. Au diapason de ce surdoué « addict » de la politique qu’on a du mal à détester tout à fait, la salle vibre à l’unisson dans une ambiance tour à tour électrique, tendue, violente, passionnée et drôle.
Ces Cartes du pouvoir n’ont rien à envier au film de George Clooney, les Marches du pouvoir (The Ides of Marchs) tiré de la même pièce originale, tellement la mise en scène parfaitement millimétrée est moderne et cinématographique. Par moment, on oublie presque que nous sommes au théâtre, l’effet est saisissant, brillant. Quant au charisme de Raphael Personnaz, il est tout aussi puissant que son homologue américain Ryan Gosling.
Il n’y a pas à hésiter… laissez vous manipuler par ces comédiens aux sommets de leur art et plongez avec délices dans cette quête du pouvoir où cynisme et naïveté s’affrontent sans relâche… Enivrant et grandiose…
Olivier.
Retrouvez toutes les chroniques d’Olivier sur son blog, L’Oeil d’Olivier, où il nous parle de théâtre, de cinéma, d’expos; où il nous fait partager ses rencontres privilégiées et où il expose ses photographies… http://www.loeildolivier.fr/
Mise en scène par Ladislas Chollat
Avec Raphaël Personnaz, Thierry Frémont, Elodie Navarre, Roxane Duran, Julien Personnaz, Francis Lombrail, Jeoffrey Bourdenet et Adel Djemai
Au théâtre Hébertot
du mardi au samedi à 21h
matinées : samedi 15h30 & dimanche 18h
Durée : 1h50